Aérospatiale

Le risque de la surmédiatisation du virage vert en aéronautique

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Lors du spectacle aérien de Fanrborough en juillet dernier, la majorité des communiqués de presse parlaient de développement durable. En fait, c’est depuis 2018, l’intérêt de l’industrie aéronautique pour la question environnementale va en grandissant. Vouloir faire sa part pour la planète est une bonne cause et l’industrie a raison de vouloir atteindre le zéro E. Mais, l’industrie aéronautique fait maintenant face à un risque de perception et voici pourquoi :

Les obstacles technologiques

Face à la pression environnementale montante, l’industrie aéronautique a décidé d’agir afin de réduire ses émissions de gaz à effet de serre. En 2020, Airbus a décidé d’être un chef de file en annonçant un avion zéro E pour 2035. Depuis lors, avionneurs, motoristes, fournisseurs et compagnies aériennes ont largement emboîté le pas. Tous ont maintenant des objectifs de réduction des émissions et de décarbonation. Il y a actuellement une volonté sincère et réelle de faire sa part.

Mais le plus gros obstacle à la décarbonisation du transport aérien n’a rien à voir avec la volonté d’agir. Le problème, c’est la technologie qui n’est pas au point et qui ne le sera pas avant des décennies. Afin de ne pas faire du surplace, l’aéronautique se tourne vers la technologie qui sera disponible le plus rapidement : les biocarburants. Si l’on sait comment les produire à petite échelle, il n’est toujours pas possible d’en produire à grande échelle. Les quantités produites jusqu’à maintenant permettent à peine de faire un vol de démonstration de temps à autre. Ce n’est pas avant 2030 que la production de biocarburant sera suffisante pour remplacer entre 25 % à 40 % du pétrole et encore. 

Coincée entre l’arbre et l’écorce

Au cours des dernières années, l’industrie du transport aérien a souvent été la cible des mouvements écologistes. C’est d’ailleurs cette pression qui a contribué à l’accélération de son virage vert. Mais puisqu’il faudra du temps avant d’obtenir des résultats concrets, cela pourrait créer une impression d’inaction. C’est pour cette raison que l’industrie ne manque aucune occasion de faire la promotion de ses initiatives environnementales. À Farnborough cette année, la moindre initiative d’économie de carburant faisait l’objet d’un communiqué de presse. Je ne sais pas combien de fois j’ai lu le mot « sustainability » en anglais, mais j’ai atteint mon point de saturation. Pour avoir abordé ce sujet avec certains collèges, je peux affirmer que je ne suis pas le seul. 

Je comprends très bien que plusieurs annonces faites cette année ne déboucheront pas avant des années. Mais est-ce nécessaire de recycler les annonces et d’en parler continuellement?

Le risque

En marketing, il est important que les attentes du public face à un produit correspondent à ce qu’il peut réellement faire. À force d’entendre parler de développement durable, de nouvelles initiatives environnementales, de la part de l’industrie aéronautique, le public va s’attendre à des résultats immédiats. Pas dans dix ans, ou cinq ans, mais maintenant. Tout simplement parce qu’en dehors des gens qui sont en aéronautique, la population ne sait pas qu’elle est l’ampleur des obstacles technologiques. 

En ce moment, la quantité de textes qui traitent du développement durable en aéronautique est phénoménale. Mais tôt ou tard, il y a une organisation d’écologistes qui va faire le bilan carbone des dernières années du transport aérien. Or il est évident que d’ici 2027 ou même 2030, ce bilan risque d’augmenter. L’inaction de l’industrie sera alors décriée, la sincérité de ses dirigeants sera alors remise en question. Puis viendra l’adoption de nouvelles lois plus contraignantes qui mettront un terme à son développement. 

La nécessité d’investir dans la R & D

Ce texte n’a pas pour but de décrier les investissements en R & D et le virage vert. Mais simplement de lancer un signal d’alarme à propos de sa surmédiatisation et des risques qui viennent avec. Pour ma part, je compte bien continuer à parler de développement durable et des initiatives qui sont valables. Mais au besoin, je vais prendre le temps d’écrire à propos du temps nécessaire avant la mise en application d’une nouvelle technologie. Mais surtout, je compte utiliser l’expression développement durable avec parcimonie.

Pour sa part, l’industrie aéronautique aurait intérêt à réfléchir sur le message qu’elle envoie et les attentes qui viennent avec. 

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26 avis sur “Le risque de la surmédiatisation du virage vert en aéronautique

  • Jean Vuichard

    Bonjour André
    Les promesses pour une aviation propre sont nombreuses et il est en effet possible de parler de surmédiatisation ou de médiatisation hâtive et excessive.
    Cependant, des investissements importants sont en cours, d’abord sur l’aviation de tourisme ou de mobilité aérienne courtes ‘distantes’ ; exemples :
    1) Le premier avion électrique certifié EASA au monde est le Velis-Electo (Pipistrel, racheté par Textron) ; non VTOL ; monomoteur, biplace ; plusieurs dizaines sur les aérodromes, avec des riverains heureux.
    2) eVTOL Volocity (1 pilote, 1 passager) vise certification pour JO PARIS 2024
    3) eVTOL CityAirbus (1 pilote, 3 passagers) vise certification en 2025
    4) Safran a développé un moteur électrique (50 kW-500 kW) (certification visée en 2023) qui a été sélectionné dans les développements en cours suivants :
    – CASSIO 330 (VoltAero) 4/5 places ; piste
    – eVTOL Tcab Tech Chine
    – eDA40 de Diamond Aircraft (Autriche)
    – avion léger biplace Integral E d’AURA AERO
    – eFlyer 2 (Bye Aerospace), biplace et eFlyer 800 ( Bye Aerospace), 8 places
    5)Wright Elecric teste un moteur électrique 2 MW
    6) ZéroAvia, société anglo-américaine, développe un groupe motopropulseur hydrogène-électrique de 2MW ; protocole d’accord avec American Airlines pour 100 exemplaires.
    7) CAE (Canada) collabore avec H55 (Batterie Suisse), Piper Aircraft et Safran pour un kit de conversion à la propulsion électrique des avions Piper Archer (28 000 dans le monde)
    8) Universal Hydrogen, société américaine avec usine à Toulouse, développe un kit de conversion à Hydrogène de ATR 72-600 et Dash 8-300. 20 commandes fermes par canadien Avmax Aircraft Leasing et 75 commandes fermes par Connect Airlines (Massachusetts).

    Donc, ça bouge, par les petits avions d’abord et par ‘’l’électrification’, avant les avions régionaux puis la pile à Hydrogène. Les éléments batteries (H55 et d’autres) et moteurs électriques (Safran, Wright, MagiCall) semblent désormais au point et prêts pour certification et intégration dans aéronefs.
    Cordialement.
    Jean

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    • André Allard

      Effectivement les promesses sont nombreuses. Pour ce qui est des avions électriques comme le Velis-Electro et la conversion des Piper Archer, cela demeure marginal et n’est possible que pour des avions école avec une autonomie de moins d’une heure. La technologie actuelle ne permet toujours pas d’avoir des avions de passagers électriques qui sont rentable. Pour les EVTOL, aucun aéronef n’a effectué de vol de démonstration à Farnborough. Ceci est un indice que la technologie n’est toujours pas au point at qu’il reste encore plusieurs années avant la certification d’un premier exemplaire.

      Pour l’hydrogène, il reste certaines choses importantes à vérifier avant d’aller à fond avec cette technologie. La plus importante est de savoir si les trainées de condensation produites par la combustion d’hydrogène ne vont pas créer plus de problèmes.

      Mais je suis d’accord sur la nécessité d’investir massivement dans la R & D mais à condition de ne pas créer de fausses attentes.

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  • C’est juste un moyen pour avoir des subventions des gouvernements et aussi pour pomper de l’argent des investisseurs qui ne comprennent pas les détails.

    La majorité des projets lancés dans ce cadre d’aviation « verte » seront abandonnés dans peu de temps.

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  • CLAUDE BOULAY

    Très bon texte. Dans certain domaine la technologie fait des pas de géants comme l’informatique mais dans d’autres c’est des petits pas. Il y a 40 ans on pensait bien qu’en l’an 2000 il y aurait des voitures volantes mais la technologie ne le permet toujours pas. Le problème est toujours le même et il s’agit trouver une façon de transporter l’énergie verte. L’électricité nécessite de lourdes batteries, l’hydrogène des réservoirs problématiques. Finalement le kérosène et les biocarburants sont les mieux adaptés actuellement et pour les prochaines décennies. Ce qui est ironique c’est que l’on essaie d’électrifier les avions régionaux et que les jets Embraer E2 175 ne peuvent pas voler aux USA même s’ils permettraient de réduire la consommation de carburant de 20% par rapport aux E175. Boeing qui déclare ne pas vouloir développer de nouveaux avions pour les prochaines années. Airbus de son coté retarde le lancement de l’A220-500 qui serait plus économiques que l’A320 NEO. Depuis les 50 dernières années les progrès ont été significatifs au niveau de la consommation de carburant mais les progrès ont été graduels. Promettre des pas de géants est risqué.

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  • Jean Vuichard

    Merci pour les précisions ; en attendant un futur possible usage de hydrogène en aviation, les trains à Hydrogène sont développés et utilisés.
    – Alstom Coradia iLint : 1er train à H2, utilisé en Allemagne sur 2 lignes dès 2018 : pas de catenaires, pile H2, batteries et moteurs électriques ; 41 trains commandés
    – Alstom Coradia strean H2 : 6+8 options commandés par FNM Italie ; pas de catenaires, pile H2, batteries et moteurs électriques
    – Alstom Coradia Régiolis H2 : 12 commandés par Régions Française ; bi-mode : catenaires, pile H2, batteries et moteurs électriques
    – Siemens Miréo Plus H : 4 trains pour Berlin nord : pas de catenaires, pile H2, batteries et moteurs électriques ; pour 2024

    Au total, de l’ordre de 60 tains à H2 commandés (par des entités publiques, certes) dont une dizaine en service.

    Alstom travaille désormais sur les locomotives : d’abord, locotracteurs de manœuvre en gare, puis les locomotives pour trains 2 000 t. Enjeu : remplacer 27 000 loco diesel sur le continent nord-américain électrifié à 1% ; beau challenge mais pas pour demain.
    Jean

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  • L’hydrogène ou électricité pour le train, le bateau ou la voiture est tout à fait concevable.

    Pour l’avion ? C’est juste une arnaque pour pomper l’argent des contribuables et des investisseurs naïfs.

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  • Jean Vuichard

    Pour que la filière Hydrogène soit pleinement efficace, l’hydrogène doit être « verte » (car processus non polluant et moins cher) et pour cela, le taux de couverture de la production d’électricité par les renouvelables doit encore progresser ; L’Europe doit être à environ 40 % (France en retard, Allemagne et Italie vers 42%, pays nordiques au-dessus de la moyenne). Avec un taux d’environ 60%, l’électricité renouvelable, statistiquement surabondante en été, sera plus massivement transformée en Hydrogène.
    Dans la décennie courante, il s’agit plutôt de la phase ‘électrification’ : des voitures, des utilitaires, des avions biplaces (école de pilotage, aviation de tourisme) et des eVTOL (taxis/transports volants de 2 places puis 4/5 places) ; l’industrialisation des batteries et moteurs électriques est désormais en place et en optimisation continue.
    Et, dès maintenant, l’hydrogène progresse significativement dans les trains, les navires (premières barges fluviales et petits cargos en construction) et aussi les groupes électrogènes (data centers, sites industriels). Pour les véhicules, l’hydrogène est d’abord envisagé comme un complément / appoint à l’électrification ; ainsi, l’autonomie d’un utilitaire électrique Stellantis, de 450 km au départ, passera à 900 km avec un pile Hydrogène 45 kW ; Faurecia a déjà fait certifier les réservoirs pour véhicules, en trois tailles différentes.

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  • @Jean Vuichard pour les taxi volant, il a beaucoup de promesses qui pouront pas etre tenu et les promoteurs de ces projets le savent tres bien et nous mentent a pleines dents. Quand on me dit que la course en Evol va couter moins cher que un taxi conventionel je ris a haute voix . Donc vous etes en train de me dire que le pilote d’helicoptere qui a pris son cours de pilote pour obtenir sa licence (et qui doit la maintenir) va etre MOINS PAYÉ que un propriétaire de taxi ou un jeune chez Mc Do ???? Je vous rappel que un propritaire exploitant de taxi garde 100% de la course dans ces poches (- les taxes). Pour le tarif de l’helicoptere electrique qui coutera moins cher, on doit compter les frais d’atterissage , l’entretien (beaucoup plus complexe que un vehicule automobile et le salaires des mécanos qui va avec) , les inspections mandatoires requise par la FAA,TCA,EASA etc,etc il restera pas grand chose sur le montant de la course pour payer le pilote. Ca va courir a pleines jambes pour venir piloter ca !! Pour de vrai je vois difficilement une couse YUL-YHU en bas du +/-$75 (avec pourboire) du taxi conventionel etre rentable. Sans parler du peu d’endroits ou tu vas pourvoir décoler/atterrir ca. Tu décolera pas ca du coin Ste-Catherine/St-Laurent a Montréal c’est sur, donc leur utilité sera pas mal limité.

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    • Pourquoi un pilote?

      Dans un drone sans voilure il y a forcement un controleur de vol qui gere au minimum la stabilité.
      Et à moins de vouloir garder un certain contrôle manuel, donc de desactiver certaines fonctions du controleur pour faire de l acro ou de la course par exemple, la présence d un contrôle manuel pour de la simple navigation est totalement inutile.

      Cette technologie n’a de l avenir que si tous est centralisé et totalement automatisé.

      Le probleme n est pas hardware, il est software (contrôle au sol) et reglementaire (Legislatif).
      L homme n y aura pas sa place c est certain.
      Ou alors au sol.

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  • Jean Vuichard

    @Bluedog : Concernant les taxis volants, je partage votre point de vue et me suis toujours interrogé sur le fait qu’Airbus est investi sur ce créneau ; pour les solutions 1 pilote + 1 passager c’est clair ; un peu plus de possibilités pour les 1 pilote + 4 passagers pour des commutations urbaines entre des points fixés (ex. aéroports – centre ville). Peut-être, en ligne de mire, les taxis volants autonomes, avec des montagnes de problèmes à surmonter.
    Les projets ‘électriques’ ‘pistes’ suivants me paraissent plus solides :
    – Kit de passage des Piper Archer ; 130 commandés par canadien CAE ; moteur électrique ENGINeUs 100 SAFRAN et batteries suisses H55
    – Biplace école eFlyer2 by Bye Aerospace ; moteur électrique ENGINeUs 100 SAFRAN ; certification FAR-23 en cours
    – ERA (Aura Aero), 19 pax, 6 moteurs électriques ENGINeUs 100 SAFRAN sur ailes hautes ; Lettre d’intention du loueur Amadeo pour 200 ex.
    Le moteur Safran vise sa certification en 2023.

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  • Jean Vuichard

    Merci pour le lien. Joby, bon candidat à être le second aéronef électrique certifié après Velis Electro de Pispistrel / Textron , biplace ‘piste’ certifié en juin 2020. Deux ans déjà sans autre certification d’avion électrique ni eVTOL, ni ‘pistes’, mais beaucoup de monde y travaille (concurrence foisonnante).

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  • Bluedog

    @Guillaume, bien que les drones fonctionne relativement bien et ce dans des conditions atmosphériques très favorables. Je ne crois pas que les FAA, EASA ou TCA serait pret a laisser voler ca avec des humains a bord sans pilote. Le risque est encore trop grand en cas de maneuvres d’urgence et de condition météroligiques changantes en altitude, en plus d’un risque de défaillance du systeme avec des humains a bord. On a juste a penser a Tesla avec leur multiples problemes avec l’autopilot au sol et ca je le rappel dans des conditions parfaite. Soleil, ligne au sol visibles , sur asphalte etc. Les accidents sont assez nombreux que la NHTSA enquête la dessus.Ce n’est pas vraiment utilisable en condition hivernal avec de la neige au sol ou en conditions de verglas etc , ou ca serait la que l’on aurait le plus besoin de ces technologies et non pas dans des conditions atmosphériques parfaites. Ca viendra éventuellement mais je crois pas que ca sera avec nous avant 15 a 20 ans.

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