AérospatialeBombardier

Bombardier face à la crise économique

Pour partager cette publication :

Bombardier a présenté hier ses résultats du premier trimestre de 2020. C’est sans surprise que l’on a appris que la compagnie avait connu un premier trimestre difficile. 

Voici ce que je retiens de la journée d’hier et ma perception de la situation chez Bombardier.

Les bonnes nouvelles

Le Président et chef de la direction de Bombardier, M. Éric Martel, avait quelques bonnes nouvelles à annoncer.

La vente du programme CRJ à MHI sera finalement complétée le premier juin. C’est un souci de moins pour M. Martel qui pourra s’occuper de la prochaine. 

La transaction entre Bombardier et Spirit Aerosystem suit son cours normal au dire des présidents des deux compagnies. Spirit affirme également que cette transaction lui permettrait de se diversifier; en ce moment la compagnie américaine dépend presque entièrement de Boeing. Spirit pourrait toujours utiliser l’émission d’obligation rachetées par la FED pour financer la transaction. 

La transaction d’Alstom est encore loin, les médias auront tout le loisir de soulever des doutes à son sujet. Mais il ne faut pas oublier que Québec appuie fortement cette transaction et continuera à le faire. La crise économique est un argument de poids afin de convaincre les autorités européennes de l’utilité de cette transaction.

COVID-19 : la grande niveleuse

Lors d’une récession, les entreprises ayant le plus de liquidités sont celles qui s’en sortent le mieux. Mais la crise que nous vivons actuellement est d’une ampleur exceptionnelle. Il n’existe tout simplement pas de plan valable permettant aux entreprises privées de passer au travers d’une telle crise. C’est ce qui explique la rapidité avec laquelle les gouvernements ont mis en place des programmes d’aide. 

Dans le secteur de l’aviation civile, la demande est pratiquement disparue en quelques semaines. La crise affecte de manière égale l’aviation d’affaires et commerciale. Toutes les entreprises voient leurs liquidités fondre à une vitesse alarmante. Grâce au soutien des gouvernements la plupart des compagnies, y compris Bombardier, vont survivre jusqu’en septembre. 

Les livraisons et le carnet de commandes 

Au premier trimestre de 2020, Bombardier a réussi à livrer 26 appareils soit deux de plus qu’en 2019. La montée en cadence du Global 7500 a donc largement compensé pour le ralentissement des deux programmes Challenger. 

Mais l’avionneur montréalais a accumulé un inventaire d’avions non livrés à cause de la COVID-19; les restrictions d’entrée au pays ont empêché les clients de venir prendre possession de ces avions. Dès que cela sera possible, la compagnie sera en mesure de les livrer. 

Bombardier affirme n’avoir reçu aucune demande d’annulation de commandes pour le Global. Pour ce qui est des deux Challengers, la baisse anticipée des nouvelles commandes est de 25% à 35%. La valeur du carnet de commandes a reculé de 0,8G $ pour s’établir à 13,6 G $.  

Dans l’aviation civile, aucune entreprise ne sait ce que sera la demande en septembre prochain; il reste encore trop d’incertitudes à résoudre pour savoir quand la crise sera terminée et quelle sera la demande. 

La production

La reprise graduelle de la production chez Bombardier est déjà commencée depuis quelques semaines. Les employés qui entreront au travail lundi seront surpris de constater comment s’appliquent les mesures de distanciation sociale. Le mois de mai servira surtout à former les employés afin de changer les habitudes de travail. Ce qui est certain, c’est que distanciation sociale et productivité ne font pas bon ménage. Je ne m’attends donc à ce que peu d’avions soient complétés durant ce mois. 

Mais il ne sera pas possible de produire des avions indéfiniment et de les laisser sur le tarmac. À un moment donné, il faudra prendre la décision de ralentir la production de manière importante. 

L’aide financière

Si vous êtes contre toutes formes de soutien financier à Bombardier, il est temps pour vous de passer à un autre texte.

La Caisse de dépôt a pris une autre participation de 500 M $ au capital action de Bombardier Transport. Cette opération avait pour but d’apporter des liquidités supplémentaires à l’entreprise. La Caisse pourra reprendre son argent lors de la vente à Alstom.

La SSUC est l’autre aide que reçoit Bombardier au même titre que des milliers d’entreprises canadiennes. Lorsque la production reprend, elle permet entre autres d’absorber la perte de productivité liée aux mesures de distanciation sociale. 

D’ici la fin de l’été, Bombardier aura accumulée près de 3 G $ en inventaire de produits finis mais non livrés. La compagnie est en discussion avec les gouvernements afin d’obtenir une aide temporaire. L’objectif est de permettre à Bombardier de toucher un revenu le temps que les clients puissent prendre livraison de leurs avions et trains. 

Conclusion

Pour Bombardier comme pour tout le secteur aérospatial, le mois d’octobre sera un mois pivot : ou bien la crise sanitaire tire à sa fin et il est possible de commencer à regarder vers le futur. Ou au contraire une deuxième vague de transmission arrive et tout est à recommencer. 

Aucune entreprise du secteur aérospatial ne pourra passer au travers de cette crise sans une aide gouvernementale. Airbus, Avior, Héroux-Devtek, Meloche, Pratt &Whitney, etc, toutes verront leur santé financière sévèrement affectée et il faudra un programme d’aide adapté à cette industrie. Mais parions que les médias québécois n’en n’auront que pour les problèmes de Bombardier.

>>> Suivez-nous sur Facebook et Twitter

16 avis sur “Bombardier face à la crise économique

  • Tom Laflamme

    Un des problème de notre industrie, c’est qu’a moins d’y travailler, on ne la connais pas vraiment.

    Aucun gouvernement n’a jamais démontré économiquement son importance en amenant des chiffres pour justifier les investissements dans ce secteur.

    J’aurais aimé voir quelque chose du genre, l’aérospatial c’est X emplois au Québec seulement, ça rapporte X millions en impôts et taxes diverses, ça représente tel pourcentage de notre PIB, c’est une industrie phare de notre économie.

    Bombardier n’a pas bonne réputation mais c’est pourtant un employeur incroyable, de bons salaire et avantages dans notre société c’est rare, on est loin des magasins à 1$, qui malgré leur richesse garde leur employés dans une quasi pauvreté.

    Vous avez raison André, la prochaine année va être très difficile, bonne chance à tous.

    Répondre
      • Tom Laflamme

        Merci beaucoup Michel Fontaine, c’est le genre de document que je cherchais.

        Répondre
    • Le problème est que vous raisonnez comme si c était un secteur économique comme un autre.

      Le secteur des transports, tout comme le secteur de l armement et de l énergie, sont des secteurs stratégiques.
      Rentable ou pas, ils sont nécessaire a une certaine embition nationale.
      C est la raison pour laquelle tous les pays soutiennent et subventionnent leur industrie respective sans aucune hésitation ni débats interne.

      On ne lance pas la conception d un avion, d un sous-marin ou d un réacteur nucléaire pour faire de l’argent, mais parce-que c est nécessaire pour rester dans la course.

      Après, si c est rentable, c est mieux, et si ça participe au pib via l export c est encore mieux.

      Répondre
      • louis martineau

        Guillaume ….Bonne déduction. C’est exactement comme ça que tous devraient voir ces secteurs économiques en particulier les politiciens qui par opportunisme politique se mettre à genoux devant ceux qui profestent des « imbécillité » quand un aide gouvernemental est demander.

        Répondre
        • Normalement, un gouvernement qui laisse tomber un projet comme le cseries serait traité de traitre.
          Jamais le cseries n aurait du tomber dans les mains d airbus (même si c est mes compatriotes). Ok c est toujours mieux que Boeing :).

          Cela arrive aussi chez nous, le gouvernement par exemple est extrêmement critiqué pour avoir laissé les turbines d Alstom des centrales nucléaires et des réacteurs navales militaire dans les mains de GE. C est pas comme si c était un composant critique à notre indépendance nationale…

          Les grands projets industriels sont plus important que la finance. Jusqu’a un certain point c est certain, car il faut les financer par l impôt. Il faut donc un certain contrôle des dépenses…

          Ce que je veux dire par là, c est qu un projets industriels c’est un savoir faire et que ce savoir faire a un coût, que l on récupère rarement financièrement.

          Mais alors pourquoi les financer? Pourquoi dépenser autant pour avoir un savoir faire pour la fabrication d un produit qu’ un autre pays allié peut vous vendre sur étagère?
          Par nationalisme.
          Pourquoi les indiens ont fait le Tejas? Pourquoi les chinois font le c919? Par nationalisme. Pas pour faire de l argent.

          Le nationalisme c est ce qui fait que tout le monde subventionne son industrie.
          Vous devriez en faire autant…

          Répondre
          • André Allard

            Il y a en Amérique du nord un fort courant à droite dont la pensée principale est de dire que le gouvernement ne doit pas intervenir dans l’économie. Ça ressemble beaucoup au Tatcherisme de anglais durant les années 80 mais en pire.

          • Guillaume

            Oui en effet c est une idéologie, communément acceptée d une grande majorité des canadiens, qui sont même persuadés que c est la norme a l international, et que l intervention de l état serait meme interdit.
            Alors que dans le reste du monde, y compris (surtout) aux états unis, l état est planificateur et interventionniste.
            D’où l incompréhension.

            Quand j entend dire, oui mais, les autres sont soutenu et subventionnés par leur état. Oui. C est juste, évident…
            C est enfoncer une porte ouverte comme on dit 🙂

            Quand on a créé airbus on a fusionné en sortie de la guerre, Messerschmitt avec une compagnie française. Dans le genre pas naturel… Airbus est donc naît d une vision politique, donc de l intervention de l état. On ne peut pas demander a un privé d avoir une vision de l avenir. Même si il y des exceptions rarissimes.

  • louis martineau

    Très bon résumé de cette lecture du rapport du 1er trimestre 2020. Bravo. Et oui, on dirait que le nouveau PDG à passer la barrière médiatique avec succès. Style moins flamboyant que son prédécesseur mais moi sa m’apparaît dans le même plan de la continuité des affaires pour la relance de la division business Jets et sécuriser ces milliers d’emplois. Rassurant pour la suite des choses je crois. …..http://lapresse.ca/affaires/entreprises/202005/07/01-5272696-les-reserves-de-bombardier-fonent.php

    Répondre
  • Il serait intéressant de brosser un tableau avec les compétiteurs (Gulfstream, Dassaults-Falcon, Embraer Phennom-Legacy-Lineage, etc). À savoir qui a un soutien financier inconditionnel de leur gouvernement pour traverser cette crise. Qui parmis les compétiteurs a les poches très très très profondes, etc.

    Ce tableau devrait aider nos gouvernements à convaincre et à savoir jusqu’ où les contribuables devraient s’engager pour sauver le soldat Ryan.

    Répondre
  • louis martineau

    Les Japonnais pourraient-ils au mieux continuer la production des CRJ pour un temps ????. Silence radio pour l’instant.

    Répondre

Laisser un commentaire

Votre adresse courriel ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *