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CSeries, A220 : aile pourrait se retrouver au cœur d’un triangle amoureux

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Durant la dernière assemblée générale annuelle de Bombardier, lorsque le président et chef de la direction, M. Alain Bellemare, avait été questionné au sujet de la mise en vente de l’usine qui fabrique les ailes de l’A220 (C Series) à Belfast.  Ce dernier avait confirmé aux médias présents qu’avant d’annoncer la mise en vente du l’usine d’ailes à Belfast il en avait informé Airbus.

 

Si Bombardier a annoncé publiquement la mise en vente de l’usine de Belfast, c’est que la réponse ou l’offre d’Airbus ne lui a pas plus. En rendant publique son intention de vendre, Bombardier passe gentiment le message à Airbus d’aller se faire cuire un œuf avec sa première offre.

 

La pari d’Airbus

De son côté, Airbus fait sans doute le pari que les acheteurs ne se bousculeront pas aux portes afin de faire l’acquisition de l’usine de Belfast et à notre avis elle n’a pas tout à fait tort : on peut oublier les acheteurs chinois car jamais le Royaume-Uni ne laisserait passer une transaction avec la Chine. Les compagnies qui ne sont pas des fabricants d’avions mais des fournisseurs de premier niveau pourraient s’intéresser à l’usine de Belfast dans la mesure où elles sont capables d’obtenir rapidement un retour sur l’investissement. Pour cela, il faudrait qu’il y ait de nouveaux programmes d’avions commerciaux sur les planches à dessin afin de pouvoir obtenir de nouveau contrats. Il n’y a que le projet de de Boeing avec son B797 sur les planches en ce moment mais la crise du MAXGATE pourrait bien le reléguer aux oubliettes. Bref pour les fournisseurs du secteur aérospatiale, il n’y aura pas grand-chose à se mettre sous la dent avant une bonne dizaine d’années et ce n’est donc pas le bon moment d’investir dans une technologie comme celle de l’usine de Bombardier à Belfast.

 

Les autres fabricants d’avions

Il reste donc les constructeurs d’avions : ATR, Boeing, Embraer et Mitsubishi. On peut oublier ATR car Airbus en détient 50%. Pour ce qui est de Boeing, l’entreprise s’enfonce lentement mais surement dans le MAXGATE et au cours des prochains mois, il devrait y avoir d’importants changement à la tête de cette entreprise. Le premier mandat des nouveaux dirigeants sera de régler le MAXGATE et l’usine de Bombardier à Belfast ne figurera pas sur leur liste de priorités.

 

La vente de sa division des avions commerciaux à Boeing permet à Embraer d’encaisser un beau chèque de 4,2 G$ US, de quoi s’offrir plein de beaux cadeaux. Mais Embraer a toujours fait sa recherche et développement à l’interne. Le Brésil a de très bons programmes de formation et il s’y gradue suffisamment de nouveaux ingénieurs pour qu’Embraer puisse développer son prochain avion d’affaires entièrement à l’interne.

 

 

 

Mitsubishi

Reste donc Mitsubishi dont le programme MRJ a accumulé retards et dépassements de coûts; la seule raison pour laquelle il est maintenu en vie c’est que le Japon et Mitsubishi en ont fait une question de fierté nationale. D’ailleurs, le MRJ est sans doute le seul programme d’avion commercial à avoir eu un musée qui lui entièrement dédié une bonne dizaine d’année avant qu’il n’effectue son premier vol payant.

 

Le MRJ90 devrait être certifié dans les prochains mois mais avec six ans de retard. (sa certification était prévue avant celle du C séries, qui elle a eu deux ans de retard). Toutes les modifications qui ont été apportées au MRJ 90 lui ont ajouté entre 5 000 et 10 000 de plus que le poids prévu. Ce qui veut dire que Mitsubishi devra consentir un escompte important sur le prix de vente afin de compenser pour la consommation de carburant supplémentaire et que les livraisons de MRJ90 se feront toutes à forte perte.

 

Heureusement pour Mitsubishi, le carnet de commande du MRJ n’est pas trop élevé; s’il compte officiellement 213 commandes fermes, les commandes de 100 appareils de Skywest et de 50 de Transtate Holding sont caduques puisque légalement ces avions ne peuvent être exploités sur le territoire américain. Ce qui laisse donc 63 commandes fermes dont 47 pour les compagnies japonaises ANA et JAL.

 

Pour ce qui est du MRJ 70, Mitsubishi a déjà laissé savoir qu’au mois de juin prochain  elle présenterait lors du salon du Bourget une nouvelle version allégée qui respecterait la clause de limitation aux États-Unis. Cette annonce confirme que Mitsubishi fait une croix sur les premières versions du MRJ qui lui auront servi de banc d’école et qu’elle se penche déjà sur des versions plus raffinées et matures. Ils se pourrait donc qu’à moyen terme, Mitsubishi ait besoin de mettre au point une nouvelle aile.

 

Une bonne partie de l’équipe qui travaille sur la certification du MRJ sont des anciens de Bombardier et connaissent très bien le potentiel exact de l’usine de Belfast et de sa technologie. Il faut rappeler que l’aile du C Series A220 n’a pas cassé durant le test du facteur de charge maximum alors que la charge atteinte durant le test est très au-dessus du seuil de 150%. Cela veut dire que cette aile pourrait donc être allégée encore plus ce qui peut représenter un atout important pour Mitsubishi qui devoivra réduire le poids de sa deuxième version du MRJ90.

 

Avec un chiffre d’affaires annuel de plus de 550 G$, Mitsubishi a sans doute les moyens de se payer l’usine de Belfast si elle en a besoin. De plus l’acquisition des ailes du C Series permettrait à Mitsubishi d’ajouter un client de plus et de diversifier un peu plus son secteur aéronautique afin d’être moins dépendante de Boeing. Pour le Gouvernement du Royaume-Uni, Mitsubishi est sans doute un partenaire de choix et il donnerait sans doute son approbation à la transaction.

 

Si l’intérêt de Mitsubishi devait se concrétiser, l’usine de Bombardier à Belfast se retrouverait alors avec deux prétendants de qualité.

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18 avis sur “CSeries, A220 : aile pourrait se retrouver au cœur d’un triangle amoureux

  • Si l’usine est vendu sans les brevets et en plus il faut mettre des centaines de millions pour diminuer les coûts dans une production qui va osciller dans les 10-15 paires par mois éventuellement, je ne donnerais pas grand chose pour ça. GKN peut ramasser le truc mais avec une subvention. C’est AIRBUS qui a le plus de chance d’acheter ou va orienter la vente vers un de ses vassaux industriels. Le tiers qui veut acheter ça devra de toutes façons parler à AIRBUS.

    PS: Le programme MRJ sera assurément un échec commercial. Ils ne feront pas une cenne avec ça. S’ils essaient de les vendre en recouvrant les coûts, ils n’en vendront pas plus de 300 sur 15 ans.

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    • André Allard

      Mitsubishi travaille déjà sur le MRJ 2.0

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      • Ça change rien. Ils ont déjà mis des milliards sans possibilités de retour. Ils auront deux choix: essayer de récupérer un maximum ou vendre à perte pour en vendre un maximum et ainsi perdre d’autres milliards.

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  • Aucun intérêt pour un constructeur rival d’acheter cette usine, et je ne crois pas que Bombardier le pourrais de toute façon, il y a ententes commerciales entre constructeurs et fournisseurs pour gérer ce type de transaction. Et l’acheter (le constructeur rival) ne lui donnerait certainement pas le droit de l’utiliser sur ses avions, de toute façon c’est techniquement impossible à moins de refaire une bonne partie de l’avion.

    Ce qui doit le plus bloquer chez Airbus c’est ce qui se passera avec le Brexit plutôt que le prix en tant que tel. Je ne serais pas surpris au final que Bombardier ne vendent pas l’usine et qu’Airbus revoit ses exigences de prix à la baisse, sinon je persiste à dire que ce sera entre GKN, Spirit et Stelia.

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    • André Allard

      Je te rappelle que l’usine de Belfast et le C Series étaient la propriété de Bombardier. Bombardier n’a donc jamais bider pour fabriquer les ailes du C Series et de l’A220 et Airbus n’a donc pas été en mesure de dicter ses conditions et restrictions. Techniquement il n’y a jamais eu d’entente commerciale entre Bombardier et Airbus à propos de l’usine de Belfast et des ailes.

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      • Qu’est ce qui ce passerait si BBD envoyait promener AIRBUS sur les baisses de prix des ailes ??? Cette usine est incontournable. C’est qu’AIRBUS sera en quelque sorte obliger d’acheter l’usine et gérer le problème du coût. Ce sera plus simple comme ça. BBD demande quelques centaines de millions de plus probablement.

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      • Quand t’achète 50,01% d’un programme qui a coûté $7 milliards pour $1, il y a toujours des coûts cachés…

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      • Ça on ne le sait pas, mais je serais étonné qu’Airbus n’ait pas pris certaines dispositions pour se protéger. De toute façon, Airbus étant propriétaire de l’A220, ils sont le maître d’oeuvre du programme et les sous-traitants, sharing partner ou pas, doivent la plupart du temps avoir la permission avant de faire des changements majeurs.

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        • André Allard

          Les documents publiés lors de l’annonce de la prise de contrôle du C Series par Airbus ne faisaient pas référence à l’usine de Belfast, est-ce que cela a été négocié avant l’entente finale? À la vitesse à laquelle s’est déroulée cette négociation il doit bien y avoir quelques détails qui ont été oubliés.

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          • Imaginons que tu aies raison, je ne comprends pas pourquoi Mitsubishi serait intéressé. Surtout que les relations entre Bombardier et MHI sont tendus depuis longtemps, pas sur que ni l’un ni l’autre voudrais avoir à traiter avec l’autre sur tous les programmes de Bombardier.

          • Ce serait le temps pour MHI et BBD de faire la paix avec l’achat de l’usine et le retrait des poursuites mais je n’y croix pas tellement. Cette usine a aucune chance de faire des profits avant plusieurs années. C’est pour ça que je pense qu’AIRBUS va ramasser le truc soit directement ou via sa filiale STELIA.

            BBD ne peut pas trop emmerder AIRBUS s’il veulent être un sous-traitant majeur pour eux. Cette industrie est incestueuse. Les gros sous-traitants couchent avec tous les avionneurs.

  • Je me demande si AIRBUS achète l’usine, ils ne vont pas acheter le reste des actions de BBD et du GQ. Parce que si AIRBUS achète trop cher à leur goût ils vont se reprendre avec la reprise des actions non en leur possession. Donc c’est le temps pour BBD de sortir complètement du programme la main haute (relativement).

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  • Louis Martineau

    Les paris sont ouvert…..8 chances sur 10 que sa sera GKN🤔🤔🤔 . Il me semble que les Britanniques qui à moins d’un miracle politique vont sortir de manière sauvage de l’Union Européenne, ils devront reconstruire leur économie. Il me semble qu’il ne peuvent laisser partir cette usine de bombardier dans des mains étrangères même si le nouveau acquéreur promet de rester à Belfast. Quitte en devenir partenaire avec GKN s’il le faut, les Britanniques vont surement pas se laisser planter comme ça. De plus le statut constitutionnel et politique de l’Irlande du Nord au sein de la Grande-Bretagne qui est stable depuis quelques années pourrait redevir très problématique si cette usine quittait ou pourrait quitter éventuellement le territoire.

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    • S’ils ne sont que 200-300 à fabriquer les ailes, déménager l’usine ne vaut pas la peine et essayer de baisser leurs salaires pour économiser serait dérisoire.

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  • Les explications sur les changement d’autonomie de l’A220:

    https://leehamnews.com/2019/05/30/airbus-a220-gets-increased-range/

    « The A220-100 now has two rows of Domestic First class at four abreast with 36-inch pitch (as before) and Economy at five abreast with 30-inch pitch (was 32-inch) for 116 seats in total.

    When we put 116 passengers in the aircraft we get still get 3,700nm so something else was changed as well. Most likely the Operational Empty Weight.

    The larger A220-300 was changed from a two class 130 seater to a 141 seater, once again by changing the economy pitch to 30 inches. Here some rows have less than 30 inches to achieve 141 seats. Here we can agree on the 3,350nm range. The aircraft is fuel limited and the maximum range doesn’t improve much with the last tonnes of TOW. The fuel limitation starts 2.5t below the MTOW with the increased seating. »

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    • Airbus calcule 90 kg par passager et Bombardier calculait 102 kg.

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