Spirit; Airbus sera-t-elle forcée d’agir ?
Spirit Aérosystem fournit les sections du fuselage central ainsi que les Ailes de l’A220, à cela s’ajoutent quelques composantes de petite taille. C’est donc le plus important fournisseur du programme. Dernièrement, l’entreprise a connu des déboires en matière de qualité avec son plus important client le B737MAX. Afin de remédier à la situation, le conseil d’administration a limogé son PDG et en a nommé un afin d’assumer l’intérim. Voilà de quoi inquiéter Airbus qui suit certainement la situation de très près.
Le nouveau PDG
Le nouveau patron de Spirit se nomme Patrick Shanahan et c’est un ancien membre du conseil d’administration de Boeing. En 2016, il a été nommé Vice-président sénior de la chaîne d’approvisionnement et opération de Boeing. Il a donc travaillé pour Dennis Muilenburg à l’époque où les profits passaient devant la qualité. En 2017, il a fait le saut en politique alors que Donald Trump l’a nommé sous-secrétaire à la défense. Puis en 2019, le président américain souhaitait le nommé secrétaire à la défense. Mais des allégations de favoritisme envers Boeing ont mis un frein à sa nomination. M. Shanahan a fini par abdiquer et est retourné au secteur privé.
Pour convaincre les membres de conseil d’administration de Spirit qu’il peut assumer la permanence, M. Shanahan devra les convaincre qu’il est l’homme de la situation. Les relations avec Boeing seront certainement au haut de sa liste des priorités. C’est normal puisque l’avionneur américain représente près de 75 % de son chiffre d’affaires. Mais il devra également avoir une idée précise de ce qu’il voudra faire des unités d’affaires basées au Maroc et en Irlande. Ces deux usines sont issues de l’acquisition des activités d’aérostructure de Bombardier en 2019. Il y a quelques semaines, l’ancien PDG de Spirit avait mentionné être en discussion avec Airbus afin de pouvoir rentabiliser les deux usines. M. Shanahan ou son successeur devront établir un plan pour les rentabiliser ou vendre le tout.
La réaction d’Airbus
Les chiffres de productions de 2023 nous indiquent que Spirit a été en mesure remplir ses obligations envers Airbus. La priorité du fabricant européen est donc d’éviter de perturber les opérations de son fournisseur. Il faut donc éviter de prendre des décisions impulsives. Le seul changement à court terme serait de resserrer les contrôles de qualité, et encore, je doute que cela change quoi que ce soit.
L’autre priorité d’Airbus, si ce n’est pas déjà fait, est de prendre contact avec le nouveau PDG de Spirit. Les premiers échanges vont être déterminants pour l’évolution de la relation entre les deux entreprises : Airbus souhaite réduire les coûts de production de l’A220 alors que Spirit cherche à obtenir plus de son client. D’ici quelques mois, l’avionneur sera fixé sur les intentions de Spirit. Pour le moment, les deux parties sont sur une trajectoire de collision.
Si les deux anciennes usines de Bombardier sont à vendre, Airbus devra s’interroger sur la pertinence ou non d’en faire l’acquisition. En 2018, elle avait tourné le dos à Bombardier, avec le résultat que l’on connaît. Airbus devra donc évaluer si elle est en mesure de réduire les coûts d’opération des deux usines ainsi que leur valeur stratégique. Le risque de subir de nouvelles perturbations fait également partie de l’évaluation. Mais bien que ce ne soit pas seulement une question de prix pour Airbus, si Spirit est trop gourmande, la transaction ne se fera pas.
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